Le deuil et l'enfant

LE DEUIL ET L’ENFANT


La perte d’un être cher pour un enfant est un moment difficile dans sa vie. Il peut s’agir de son papa, sa maman, son frère, sa sœur, un papi, une mamie…La majorité des parents de jeunes enfants rencontrés lors de l’organisation des obsèques sont démunis, ils ne savent pas comment annoncer la mort à leur(s) progéniture(s) et pensent qu’il est préférable de les écarter de la chambre funéraire et des rites funéraires.

Pourtant, de nombreuses études montrent aujourd’hui clairement l’intérêt de faire participer les enfants à ce moment de vie, de leur laisser le choix de venir ou non voir le défunt et d’être présent à la cérémonie des obsèques. Car, l’enfant, intégré ou écarté de ce moment, vivra un deuil, posera des questions sur la mort à ses parents. Les interrogations seront d’autant plus nombreuses s’il ne voit pas de ses propres yeux, son imagination débordante (selon l’âge) peut alors le laisser grandir avec des idées fausses sur la mort et penser que la mort « c’est mal ». Mais, nous sommes malheureusement tous amenés à perdre des proches au cours de notre vie.

Bien souvent, les parents projettent leurs peurs de la mort sur les enfants (nos peurs de perdre, de mourir, de souffrir, de ne pas trouver les mots justes pour les enfants et craindre d’aggraver la situation). C’est pourquoi, il est important d’éviter de dire à un enfant :

-Ton grand-père est au ciel

-Il est bien mieux là où il est, il ne souffre plus

-Ta petite sœur dort

-Mourir c’est faire un voyage

-Ta maman veille sur toi, elle continue de te voir, il faut être gentil

-Maman a perdu papa

Les parents ne doivent donc pas avoir peur d’utiliser le mot MORT avec leur(s) enfant(s).

Il est cela dit important de préparer un enfant à la vue de son proche disparu en chambre funéraire. Vous pouvez :

-Décrire la pièce

-Expliquer les vêtements qu’il porte

-Dire qu’il est allongé sur un lit spécial, qu’il a les yeux fermés. C’est comme s’il dormait mais, son corps ne bouge plus du tout car son cœur ne bat plus et il ne respire plus.

-L’enfant peut toucher le corps, l’embrasser, mais, il sentira que c’est très froid car c’est comme ça lorsque l’on est mort.

-Lui dire le nombre de jours restants avant la cérémonie (utiliser les dodos pour les plus jeunes) s’il souhaite revenir le voir.

-Expliquer de la même façon l’inhumation ou la crémation.

Pour aider les parents, voici la définition de la mort et du deuil faite par Louise RACINE, accompagnatrice et formatrice sur le deuil à MONTREAL depuis plus de 25 ans. Ne prenez que ce qui résonne en vous :

« Quand une personne décède, nul ne sait où elle va. On sait qu’elle ne reviendra plus, en tout cas comme nous l’avons connu. Son cœur a cessé de battre et, on est certain que son corps ne souffre plus. On ne pourra plus ni l’embrasser, ni la voir, ni entendre sa voix ou sentir son odeur, ni l’entendre parler ou la voir bouger. C’est vrai que perdre c’est difficile parce que la mort est permanente, irréversible, mystérieuse et inconnue. Il est normal d’éprouver de la peine quand quelqu’un qu’on aime meurt. Au cours du deuil, la présence de la personne défunte se transformera et, elle pourra exister à l’intérieur, dans nos cœurs. On pourra garder le souvenir de tout ce qu’on a reçu d’elle et, garder le souvenir chaleureux de quelqu’un c’est continuer de le faire exister en soi ».


LE DEUIL CHEZ L’ENFANT

Comme évoqué précédemment, les parents sont souvent démunis et animés de fausses croyances en voulant préserver l’enfant du malheur, en pensant qu’il est trop petit pour comprendre, qu’il n’est pas nécessaire de l’inquiéter…Mais, le jeune enfant se sent coupable de la mort de son proche car pour lui, la mort n’est pas naturelle. On ne meurt pas, on est tué. Le simple fait d’avoir pensé quelque chose de mal envers la personne décédée peut le faire penser qu’il est responsable de la mort. De plus, la mort est réversible, on meurt puis on revient. Si on ne revient pas, c’est que l’on n’est pas assez gentil… L’enfant pense également que la mort est contagieuse, qu’elle s’attrape, il a ainsi un fort sentiment d’insécurité surtout face à la perte d’un parent.

Le deuil d’un enfant va dépendre de la façon dont le(s) parent(s) vit son deuil et ce qu’il pense que son entourage souhaite de lui.

DE 0 A 3 ANS

L’enfant ne sait pas ce que le mot mort signifie, il va réagir à l’absence et à la tristesse de ses proches.

DE 3 A 5/6 ANS

C’est l’âge de la toute-puissance et de la pensée magique. Il est conseillé de faire attention à la culpabilité surtout si c’est le parent du même sexe qui décède. A cet âge, l’enfant associe la mort à l’immobilité mais son caractère irréversible n’est pas encore acquis tout en faisant la différence entre la vie et la mort. Il joue beaucoup à la mort dans ses jeux. Il est impacté par les changements de rythme de la journée (qui vient me chercher à l’école…), il est ainsi recommandé de maintenir les habitudes de l’enfant.

DE 6 A 8 ANS

C’est le début de l’acquisition du caractère irréversible de la mort. La vie a un début et une fin. Il porte un intérêt particulier au devenir du corps après la mort et sera très curieux sur le sujet. Pour lui, on ne meurt que lorsque l’on est vieux. Il peut ainsi se sentir différent des autres enfants de son âge et avoir un sentiment de honte s’il perd un parent. Ils ne veulent pas en parler aux copains.

DE 8 A 12 ANS

L’enfant commence ici à réfléchir au sens de la vie, de la mort et il a besoin de comprendre les causes véritables du décès (ne pas hésiter à voir le médecin pour lui expliquer si besoin). Il a aussi peur du caractère héréditaire de la maladie, de la mort vis-à-vis de sa propre mort et de celle des autres. Il montre de l’indifférence, ne pleure pas beaucoup, dit que ça va pour se protéger. Il veut également protéger le parent survivant, ne pas le rendre davantage triste. C’est pourquoi il travaille bien à l’école, participe aux tâches ménagères… La phase de choc (moment de l’annonce de la mort) peut être décalée. Il a entendu mais il ne peut pas l’intégrer sur le moment, cela est normal. A cet âge, il vit son deuil en pointillé (questions, chagrins, copains, jeux…) car le deuil prend beaucoup d’énergie et l’enfant est en pleine croissance. Vivre son deuil en permanence est impossible pour lui. Il pourra ainsi être parfois plus agité.


Comment aider son enfant lorsque l’un des parents décède :

-Lorsqu’un parent d’un jeune enfant décède, le sentiment d’abandon est très présent. Il aura donc besoin d’être régulièrement rassuré par l’autre parent.

-S’il se sent responsable de la mort, lui demander ce qu’il imagine, qu’est-ce qui le fait penser cela. Cette culpabilité peut entraîner une agressivité envers soi, les autres ou encore une conduite d’échec. Il peut aussi avoir un sentiment de honte selon les circonstances de la mort. Répéter dans ce cas qu’ils ne sont pas responsables et que, ce qu’ils ont dit ou pensé n’a pas provoqué la mort.

-Lui donner le temps d’intégrer la perte au moment de l’annonce de la mort car même s’il a compris, il peut montrer une insensibilité provisoire. Il a besoin de temps pour reconnaître la vulnérabilité du parent décédé, sa disparition et ce sentiment d’abandon.

-Nécessité de l’entourage de parler du défunt régulièrement car l’enfant n’a pas la possibilité de se souvenir du défunt sans y revenir sans cesse. Favoriser les objets, vidéos, photos…

-Le pire pour l’enfant est de se sentir trahi et qu’on lui a menti. C’est pour cela qu’il est conseillé d’être transparent sur les circonstances de la mort tout en évitant de lui annoncer dans sa chambre et le soir.

-En cas de suicide, utiliser ce mot « se donner la mort ». S’il est trop difficile d’expliquer comment, lui dire que pour le moment ce n’est pas possible mais qu’on le fera plus tard. Bien dire que le parent restant ne valide pas cette mort car la vie c’est important. S’il y avait une dépression avant le suicide, dire que pour le suicidé, c’était la souffrance qui était insupportable et non la vie.

-Préciser que personne ne va remplacer son parent décédé

-Dire à l’enfant que la personne décédée ne sera jamais oubliée, qu’elle fait partie de son histoire, que vous allez continuer de l’aimer

-Favoriser les rituels aux anniversaires, Noël…

-Vivre ses émotions

-L’adulte doit accepter son impuissance face à l’enfant (silence…)

-Proposer à l’enfant de parler de lui avant de parler du défunt.

-Eviter de dire : « Arrête de pleurer, ça va aller », « les garçons ne pleurent pas », « il va falloir soutenir ton père, ta mère, c’est toi l’homme de la maison maintenant » …

-Garder à l’esprit que l’enfant n’exprime pas sa souffrance par la parole mais, par le corps, par son comportement et son mode de relation à l’autre. C’est pour cela qu’une certaine agressivité peut apparaître à un moment car l’enfant va exprimer sa souffrance dans la recherche de limites. Il peut aussi avoir des maux de ventre, de tête, des problèmes de peau car cela permet d’attirer l’attention du parent. Ne pas forcément tout mettre sur le psychologique et vérifier qu’il n’y a pas de problème organique. Des troubles de sommeil, d’appétit, d’apprentissages…peuvent également survenir. Si cela persiste, il peut être utile de consulter.






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